David Orme raconte son lancement d’activité et ses expériences au sein de notre tiers-lieu suite à sa reconversion professionnelle vers l’ébénisterie.
ÇA FAIT QUOI D’ÊTRE RÉSIDENT ICI MARSEILLE ?
“Être résident à ICI Marseille me confronte à des gens déjà bien implantés dans leur activité. Ça me permet d’avoir des exemples de directions à prendre, de voir ce qui fonctionne ou pas. Quand je vois des résidents faire des choses qui m’interpellent, je traine derrière eux et j’observe. Il y a autant de techniques que de résidents. Chacun fait à sa sauce, tout le monde à sa vision propre. Ça m’alimente. C’est une vraie chance de pouvoir démarrer ici. D’abord parce qu’il y a très peu de frais, mais aussi parce que je n’aurais pas pu gérer certaines choses seul, comme mes premiers projets d’aménagement par exemple. Quand on démarre sa reconversion, tout est flou. C’est important de pouvoir être rassuré. Ici, tout le monde est prêt à aider et ouvert à partager son expérience. Je peux côtoyer des gens avec des parcours si différents du mien. On confronte, on remet en question en permanence, c’est une grande richesse. Sans parler d’artisanat, je trouve qu’on s’enferme de plus en plus dans des bulles aujourd’hui. Alors des lieux comme les ateliers de Make ICI, qui mettent en avant la communauté, ça a une vraie valeur. Le collectif, c’est la responsabilité envers l’autre. C’est vital.”
COMMENT VIS-TU LA RECONVERSION ?
“La reconversion, je vois ça comme un démarrage en côte. Donc m’entourer d’artisans déjà rodés, motivés et compétents, qui apportent de bons conseils, c’est un vrai soutien. Ça aide à trouver l’énergie et l’inspiration le matin quand on se retrouve tous à l’atelier. En sortant de mon CAP, je voulais m’installer rapidement pour ne pas perdre l’inertie de la formation, je pense que j’ai trouvé le lieu idéal. À ICI Marseille, j’ai la possibilité d’apprendre de bien des façons. Même chez les ébénistes, tout le monde a un peu sa spécialité : pose, massif etc.. Tout se complète. Être dans cet écosystème donne l’occasion d’aider sur des projets au dessus de mes compétences. J’aide des résidents, bien plus expérimentés que moi, qui peuvent se retrouver en galère de temps sur de gros projets. Je ne dis jamais non à ça, car c’est comme ça qu’on apprend beaucoup. À mon arrivée par exemple, j’ai pu contribuer à l’aménagement de l’exposition L’Objet d’une Rencontre au Musée d’Histoire de Marseille.”
QUEL A ÉTÉ TON PARCOURS JUSQU’ICI ?
“Ça fait à peine un an que je suis installé à mon compte en tant qu’ébéniste. Après mon CAP, j’avais la compétence technique, j’ai appris à être salarié, mais on ne m’a pas appris les compétences d’entreprise. Aujourd’hui je me confronte à des choses que je ne connais pas : gérer mon temps, reconnaitre la valeur de mon travail, prendre confiance face aux clients. Par bonheur, la possibilité d’échanger avec les autres résidents d’ICI Marseille sur leur parcours d’entrepreneur favorise grandement cet apprentissage. J’ai été photographe, animateur pour enfant, prof d’anglais à la fac, et surtout, je suis américain. Alors, en arrivant en France, c’était compliqué de trouver de travail dans ma branche dans une langue que je ne métrisais pas bien. Aller vers l’ébénisterie, c’était retourner à quelque chose de plus manuel et plus instinctif, et casser avec ce problème de langue. Ayant été régisseur de musée, j’étais déjà un peu dans le bois, puis mon grand-père, très bricoleur, m’avait déjà transmis une partie de ce savoir-faire. C’est assez naturellement que je me suis retrouvé là-dedans.”
QUEL EST TON RAPPORT À L’EBENISTERIE ?
“J’ai étudié l’anthropologie culturelle à la fac, et je sais qu’il y a un rapport important au bois : il représente l’état d’être humain dans son évolution. Moi, je pense que c’est grâce aux arbres qu’on existe. Je dirais même que c’est miraculeux : on peut tout faire avec un arbre. J’aime faire de l’objet et du meuble dans une veine artistique. Même si je fais aussi du sur-mesure à la demande, ce que je préfère, c’est être vraiment créateur. Je cherche une connexion à notre passé en tant qu’être humain. Mon approche c’est de passer de la Terre à l’objet. C’est pourquoi je préfère le massif au placage. Ça change avec le temps, ça se patine, c’est vivant.”
Retrouvez le travail de David Orme sur l’ébénisterie ici et sur la photographie là.